Monde – Hamadou Diarra





Nous allons terminer cette soirée avec un texte de notre auteur attitré Hamadou Diarra qui sait si bien nous faire voyager dans son pays au temps de griots… Vous pouvez le trouver sur sa page « Les écrits d’Hamadou »

Je vous laisse le loisir de découvrir un de ses écrits ! Il s’intitule « Le poète mourant » Alors bonne lecture et excellente soirée à toutes & tous. Gros bisous et à demain, je vous love ! Paola

« Le poète mourant »

J’ai vécu entouré, mais dans la solitude
J’ai vécu sans danger, mais dans l’inquiétude
Elles me rongèrent et m’envoyèrent leurs adieux
La beauté des fleuves que créa le bon Dieu

La paix image, mon apparence forte
Faible devant l’inconnue, mon apparence morte
Les herbes sur la route manquaient de rosée
Cri de la mort, mon âme se reposer

J’ai beau résister, mais me rejette la nature
Sans plume ni pinceau, que sera le futur
J’ai vécu ma vie sans regret ni fierté
Et au trépas, je vais me coucher sans clarté

Oui, de la poussière que je suis
Malgré ma chair, mon sang et corps qui fuit
Aussi de la poussière il faut que j’y retourne
Sagement siège la mort que nul contourne

Il était un écrivain, un conteur mystique
Inconnu de tous, mais un poète lyrique
Il aimait réunir les gens autours du feu
Pendant les nuits d’hiver et les étés frileux

Il aimait conter des histoires du temps
Du lièvre, le petit malin aux enfants
Des histoires des ancêtres aux adultes
Les appelant à ne pas oublier les cultes

Il aimait les gens même atteint de maladie,
Et ses poèmes qui étaient toute sa vie
Il aimait parler des qualités de sa femme,
De son sourire, sa démarche de grande dame

Il aimait profiter de la tranquillité
Et s’inspirer de l’air frais matinal des étés
De la fougue dans l’aile, il parcouru la terre,
Seul dans les forêts, les abeilles guerrières

Dans les nuits sur le quai d’une mer dormante
Il écrit, réécrit des histoires palpitantes
Libre comme une plume d’oiseau dans le vent,
Sa vie toute heureuse, une épouse, deux enfants

Le poète mourant, il cherche à chanter
Sa langue ne tenait, il demande à l’hanter
Dans la peine qui avait toujours prit son cœur
Il y mena sa vie pour donner du bonheur

Entre les lignes, un homme vivait du peu
De ces beautés écrites qui le rendaient heureux
Tout seul sur son lit, il continua d’écrire
Des vers résumant tous ses beaux souvenirs

J’ai apprit dans la peur à survoler la terre
A humer tout seul le parfum des jolies fleurs
J’ai apprit à admirer la couleur de l’ambre
Le couché du soleil tout au fond de ma chambre

J’ai apprit la nuit la fluidité du temps
La sincérité des vœux émis dans le vent
J’ai apprit la poésie pour tenir la plume
Pour adoucir des peines qui consument

J’ai apprit à voir la vie d’autrefois
La gouvernance de ces djata, mes rois
J’ai apprit le repos des âmes combatives
Le bruit des vagues qui s’échouent sur les rives

J’ai apprit à oublier le passé et m’armer
De rires pour mener des luttes acharnées
J’ai apprit à sourire aux princesses bosseuses
Au milieu des fauves aux griffes rageuses

J’ai apprit à parler à dieu tout en larme
A toujours croire à un monde sans vacarme
J’ai apprit à penser à demain sans terre
A la disparition de toutes ces mers

J’ai apprit à aimer le vide, à dessiner
La nature sans couleur en sa forme innée
J’ai apprit à conter la règne du lion,
L’hyène qui rit de la putréfaction

J’ai apprit à n’être quelqu’un que moi-même
A œuvrer seulement l’évidence suprême
J’ai apprit à faire séduire les cœurs
A aimer les filles et garder mon honneur

J’ai apprit à prendre les lèvres toutes molles
Sous la chaleur des douces peaux sur le sol
J’ai apprit à écouter même à minuit
Les amis et à partager leurs ennuis

J’ai apprit à respecter dans l’indifférence
A montrer la lueur du beau soleil immense
J’ai apprit à décrire le blanc et le noir
La faiblesse des hommes et leur soif de pouvoir

Mais, je ne saurai jamais apprendre à mourir
A voir tout sans pour autant rien écrire
Je ne saurai vivre tout seul après la mort
M’éterniser sans vous ni votre amour encore

Il appela ses connaissances et sa famille
Au lit, il était couché comme une chenille
Ses mains paralysées, il mourait dans son corps
Mais pouvait sentir le temps qu’il lui restait encore

La souffrance rongeait à petit feu son âme
Le monde qui l’entourait déjà le réclame
Il leur parla tendu de mort, son départ
Et sentit de la tristesse dans leurs regards

La mort sans respect ni grandeur, la mort si lente
La mort imprévisible et pourtant si violente
Pas seulement celle qu’il appelait ma fleur
Ou ses enfants qui étaient si cher à son cœur

Mais aussi tous ceux qu’il avait intéressé
A travers ses écrits, ou un jour influencé
Avait chacun commencé à verser des pleurs
Murmurer leur amour pour cet homme rêveur

Pour lui, l’écriture était toute sa vie
Et sans sa plume aucun sens n’avait sa vie
Il ne vivait qu’entre les lignes de ses feuilles
Blanches qui finissent par lui prendre un œil

Il était un écrivain, pour les consoler
Il savait qu’il n’avait pas à être désolé
Mais qu’il avait surtout à les tenir en haleine
Jusqu’à ce que prenne le dessus sa triste peine

Et il se met à raconter des histoires
Auxquelles la mort n’emportait pas l’espoir
Ses rêves et inquiétudes au fond de ses nuits
Qui l’empêchaient de dormir depuis

Je cherchais un jour, loin du mal enfermé
La porte des cases, étaient toutes fermées
La tête et la pensée bandées de nostalgie
La main et les pieds si pleins d’énergie

L’inspiration, j’entends le chant du bonheur
Le chant généreux, berceau de mes pleurs
Je lui demande, bonheur ou étais tu
Laissant mon âme et ma plume dévêtues

Il m’a répondu, j’étais quand faisait l’aurore
A la cité des âmes, la cité des morts
Le soleil encore caché dans son fourreau
J’étais dans le vent, l’air frais des tombeaux

J’étais, quand dans son parcours quotidien
Le beau soleil venait juste au méridien
Dans la volonté, les coulures de sueur
De cet homme travaillant sans trêve pour l’heure

J’étais, quand dans le calme ce même soleil
Flamboyant de lumière et de merveille
Derrière cette belle colline du pouvoir
Se couchant timidement un jeudi soir

Dans les abords du magnifique Djoliba
Le Djoliba de l’espoir et de combat
Regardant cette jeune femme, une veuve
Qui, à la fin du deuil, se lavait dans le fleuve

Et maintenant que l’eau de la pluie est calme
Là où remportent les sorcières la palme,
Je viens à toi, l’homme au cœur esseulé
L’âme fragilisée mais les yeux éveillés

Je suis là, à tes côtés, là avec toi
Je suis là, dans ta main entre tes doigts
Comme je suis et vole là où tu crains
Dans les bois touffus ou les monts lointains

Je suis là dans les syllabes des poètes
Ces belles syllabes qui riment la sœurette
Comme je suis dans ces mots des cantatrices
Louant les braves hommes de leurs cicatrices

Je suis là perdu où enseigne la solitude
Où le retrait passager pour les études
Comme je suis dans le regard et le sourire
De tes enfants et ta femme que tu admires

Le conteur public qui continu, un matin
Je regardais un paysage si lointain
Quand se levait dans le silence, le soleil
De son long fourreau avec ses yeux vermeil

Et j’attends aussi la clarté de la nuit
La lumière jusqu’à ce qu’elle se soit réduit
Puis les étoiles et la lune qui se lèvent
Apparaissent aussitôt dans mon rêve

Toujours esseulé je rêvais dans le silence
De la nature, la peur de mon existence
A la source céleste de l’air si paisible
Aux coutumes des ancêtres jamais nuisibles

J’ai rêvé au ciel mais aussi à la terre
J’ai rêvé à l’humanité et tous ses mystères
La terre plus calme, mais aussi plus stable
L’humanité toute réunie autour d’une table

Mais voila soudain j’ai ouvert mes yeux
Je ne vois et n’entends que des adieux
Des pays tout entier, des reines en deuil
Des hommes malades, des mains sans accueil

Des grèves, confits et guerres à la mode
L’atome et le nucléaire qui accommodent
Qui causent des pertes humaines, des ruines
Des paniques ou des fuites dans la bruine

Alors j’ai regarde mon Afrique, ma terre mère
Détruite par des maladies et toutes ces guerres
La pauvreté, la famine, la sécheresse
Alors je verse ruisseaux de larmes, ma détresse

Car la beauté de ma peau, la force de mon âme
C’est la voix de l’Afrique, le bruit des tamtams
Résonnants dans les villages de mon Afrique
Qui est triste, sombre, sauvage et laïque

Elle était belle sous le règne des ancêtres
Aux paroles qui éduquent car elles pénètrent
Qui enseignent, renseignent, vivent et répondent
Aux questions dans les nuits toutes profondes

Elle était belle mon Afrique, ma patrie
Dans ses danses possédées, louant ses esprits
De l’unité, de la paix mais aussi de la pluie
Qu’on oublie un matin et le peuple s’ennuie

Je vivais que pour écrire et j’écris avec vos mains
J’ai vu avec vos yeux la souffrance des uns
Je n’ai écrit que ma vie qui est aussi la votre
Car cette vie est une que j’appelle la notre

La femme et l’argent, les choses à vanter
L’amour, la haine, mêmes mots à chanter
J’ai conseillé les faibles ainsi que les rois
J’ai fêté vos fêtes mais gardé ma foi

Ma tache lourde, mais unit il à vos yeux
J’ai donné ma vie juste pour être heureux
Qui pleure ma vie, mon souffle réduit
Mon âme et que la paix soit avec lui

Qui peut, dans le silence prendre la relève
Achever ces vers et continuer mes rêves
Qui peut soutenir le monde puis mourir sans traces
Consoler des amis ou souffrir à leur place

Qui pourra, seul sans prières ni récompenses
Sans renom, mais simplement tout en silence
A mes anniversaires, avant qu’il ne tombe
Apporter des roses et m’arroser la tombe

Planter mon tombeau de dattiers comme enseigne
A qui mes dernières volontés enseignent
Ce qui coupe mon sommeil c’est que tout les vers
Que j’ai écrit et qui m’ont été pour moi la lumière

Ne tombent dans la désuétude ou l’oubli
Que connaissent certaines œuvres de la vie
Mais s’il n’a personne pour répondre a mes souhaits
Laissez donc mon âme se reposer en paix

Loin des commentaires, vos sages critiques
A titre posthume ou monuments honorifiques
Laissez mon âme sentir le vide dans l’air
Le bonheur qui règne dans les fosses tumulaires

Ecouter le bruit de vos pas et vos tasses
Vos intimes secrets murmurés à voix basse
Laissez ma pauvre âme muer sur les toits
Miauler sur ces murs qui étaient a moi

Vous niez ma femme sans niez mes biens
Refusez mes enfants, mon malheur est divin
Car mon sort c’est Dieu qui a décidé ainsi
La mort à tour de rôle quand ton eau finie

On naît un jour, s’assoit, marche à quatre pattes
S’arrête, marche debout, meurt entre deux dates
C’est Dieu qui me créa et m’appelle enfin
A l’heure, sans seconde de plus, ni parfum

On abandonne tout pour suivre la destinée
Loin de tout, le nu en sa forme innée
La pudeur du cœur de son amoureux terni
L’amour en deuil, mais le paysage reverdit

Loin de cette ville ou résonnaient mes pas
M’attendra une innocente amante au repas
Qui pourra la faire oublier le temps passé
Réanimer la beauté de son corps chassée

Sécher ses pleurs qui m’éveilleront la nuit
Bercer ses enfants et son cœur sous la pluie
Je demande qu’elle ne tombe dans la détresse
Qu’ont connues certaines épouses ou maîtresses

De mes amis, braves collègues disparus
Ces écrivains déterrant les bonheurs perdus
Car avec elle j’ai retrouve ma vie manquante
La tendresse, la toute réussite florissante

Je pense à ma vie, à tout ce qui nous ressemble
Ces promenades et ces photos prises ensembles
Je l’ai trop aime et mon cœur ne s’est point lassé
Le temps de ma vie n’aurait jamais du passer

C’est comme si le soleil n’avait jamais lui
Et la lune, jamais éclairée la nuit
Comme si je n’avais connu qu’un seul jour
Et disparaître le lendemain pour toujours

Mais en vérité ne faudrait-il pas mourir
Avant que l’on fasse ce beau monde souffrir
Mourir dans le sommeil quand on vit encore
Quand notre âme est encore utile dans le corps

Les mains ayant toujours la force de semer
Le cœur ayant encore la force d’aimer
Mourir encore quand la mort est inévitable
Par ses jours et ses conditions jamais stables

En se disant que la mort ne prend que les corps
Mais jamais le renom de ces actes en or
Et survivre quand on peut encore mourir
Tout en se nourrissant de ses beaux souvenirs

Vivre par-dessus le temps et tous les obstacles
Attendre le jour d’espoir et de miracle
Pour vivre ses jours d’amour comme les derniers
De réussite et de gloire comme les premiers

Aimer comme si la mort n’était qu’une histoire
Et les disputes rien qu’un nouveau départ
Vivre de jour comme de nuit son amour
Les vivre sans risque et pour toujours

Ainsi donc comme Jack dans son dernier temps
Son amour serra ici mon dernier chant
Plus jamais la terre n’entendra ma voix
Et plus jamais je ne serai dans les bois

Les pieds et les mains ainsi paralysés
Les yeux et la langue aussi épuisés
Il ferma ses yeux et s’endort aussitôt
Avant que son âme ne s’envole là-haut

@ Hamadou DIARRA – (TDR)

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A propos Paola

Mon pseudo "Kaki Sainte Anne" Ecrivaine, mais je suis Béatrice Vasseur et je signe tous mes articles ici sous le nom de "Paola" mon second prénom
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