Cameroun – Hôpital Laquintinie, les malades sont nourris par leurs familles

Dans cette formation sanitaire publique, le budget nutrition n’arrive pas toujours à temps. Avec tous les risques de contamination que cela comporte, le système débrouillardise est en place en attendant les fonds du ministère de la Santé publique. Reportage.

Le reflet du soleil rehausse l’éclat du bleu et du blanc, les deux couleurs du pavillon Samuel Eto’o Fils. Une tente se dresse sur l’esplanade du service « urgences-réanimation » et celui « accueil pédiatrique ». Sous celle-ci, les chaises en plastique de couleur blanche sont disposées. Espacées d’un mètre, l’une de l’autre. Une cinquantaine de personnes occupent celles-ci. Nous sommes au sein de l’hôpital Laquintinie de Douala ce mercredi 6 mai 2020. Il est 12h. Parmi les personnes présentes, il y a celles qui viennent se faire consulter pour passer un test de dépistage de la Covid19, celles qui viennent chercher leur résultat et d’aucunes venues donner à manger à leur proche interné dans ce pavillon accueillant les malades du coronavirus.

Vêtu d’une chemise carrelée violet-blanc et d’un jean, Richard est assis, avec à ses pieds des sacs plastiques. Il range des gamelles dans un emballage plastique rose, puis inscrit un nom sur un bout de papier qui est collé sur le sac à l’aide du scotch. Richard se lève et va déposer le paquet sous la porte portant l’écriteau « accueil pédiatrie». D’autres personnes assises sous le chapiteau se succèdent pour le même exercice. On peut les entendre annoncer aux leurs indiquer au téléphone qu’ils sont déjà là avec le repas.

Dix minutes passent. La porte devant laquelle sont rangés les repas s’ouvre. Une infirmière apparaît, arborant une surblouse à usage unique, un appareil de protection respiratoire et des gants. Une charlotte recouvre ses cheveux et ses pieds sont aussi protégés. Elle appelle un premier garde malade. « Garde malade monsieur B ? » La dame se lève. « Ton ticket est où ? Si tu n’as pas ça ou si ça se perd, il ne recevra plus rien de toi.» Elle se tourne, va porter un sac plastique rouge et dépose au sommet de l’escalier. « Tu es un garde malade prioritaire. Montre le ticket ? Ok c’est bon porte ton sac». Puis elle poursuit : « Ceux qui ont les paquets, déposez ça là-bas », en pointant du doigt le seuil de la porte où sont posés les autres repas. Avant d’emporter les sacs, l’infirmière se rassure que des noms y sont accolés.

Vingt minutes plus tard, c’est au tour d’un infirmier de sortir du bâtiment versant pédiatrie. Celui-ci semble mieux équipé que la première. En plus de son calot couvrant et son masque, il a une visière de protection. Il dépose des sacs et procède à l’appel. Garde malade monsieur F. Le garde malade se reconnait et va récupérer le sac plastique estampillé complexe Santa Lucia. Il revient déposer la besace et porte une autre sans se désinfecter ni se laver les mains. Il ouvre la gamelle verte, verse le contenu de celle-ci dans la rose et se met à manger son couscous sauce pistache.

Le garde malade de Samuel n’aura pas cette chance. Une fois son sac à l’extérieur, elle est sollicitée pour monter donner le bain à son malade. Elle fait appel à son frère qui s’apprêtait à aller passer son test de dépistage. Ça attendra une autre fois. Il enlève son boubou et suis l’infirmière à l’intérieur du pavillon.
Approchée, une garde malade raconte : « Mon malade était en clinique. Il a eu des complications respiratoires et on nous a référés ici voilà trois jours. Dès notre arrivée, on m’a demandé de venir avec la nourriture le lendemain. Ce matin, je suis venue avec le café. Là, je prends le sac, je vois que le pain avec la salade est encore dedans mais le lait n’y est plus. »
Monsieur Y. par contre arpente les couloirs de l’hôpital Laquintinie depuis plus d’une semaine. Pour lui, ça a été un arrêt brusque. « Un jour mon malade m’appelle pour m’informer que l’hôpital dit qu’à partir de demain c’est la famille qui doit venir avec la nourriture. Sans plus », raconte-t-il.

La fin du calvaire
Une source à l’intérieur du pavillon indique que ce sont les finances qui manquent le plus. Une situation que confirme une autre source médicale. Jointe au téléphone, elle explique que cet état des choses est dû au non-approvisionnement du crédit alimentation par le ministère de la Santé publique. « Depuis environ une semaine, le crédit alimentation n’est pas approvisionné par le ministère de la Santé publique. A un moment, on est obligé de faire avec les réalités», apprend-on.
La même source rassure néanmoins : « il y a eu un approvisionnement et je crois que les choses vont revenir dans l’ordre dès ce jeudi 7 mai 2020. Il y a eu un budget qui a été alloué par le ministère de la Santé publique pour que la nutrition des malades continue. Dès demain, ils vont recommencer à recevoir leurs jetables car, ce sont des trucs empaquetés et jetables après repas. »

Mais la vaisselle qui entre et ressort du bâtiment constitue un probable agent de contamination et de propagation du virus. La source explique : « Les assiettes qui ressortent passent par la case de désinfection avant d’être remis au garde malade. En général quand ils viennent déposer des plats, ils ne les reprennent pas. Dès que le malade a fini de manger, il nettoie ses assiettes et il les garde là-bas. Car c’est du matériel qui peut contenir des germes. Ce n’est qu’en cas extrême qu’on laisse la vaisselle sortir et on les décontamine au préalable dans les salles. »

(Source COVID19.CM – Armelle Sitchoma)

A propos Paola

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